Vous vous souvenez du petit pull marine noyé au fond de la piscine ? Adjani chantait ça en 1983. Eh bien quarante ans plus tard, Madame sort enfin son deuxième album. On bat sans doute un record ici, ce qui légitime l'emploi du mot « événement ». Bon, il faut comprendre que "Bande Originale" a été entamé il y a... pfiouuu, au moins tout ça ! Et oui, le disque sonne en effet comme la B.O. d'un film imaginaire, où il est question de rupture amoureuse et du Japon. Quid de ce long délai (17 ans, puisque je sens que vous vous demandez) ? Qu'importe. C'est à la persévérance de Pascal Obispo – et au coup de main de Cécile DeLaurentis – qu'on doit aujourd'hui à ce LP d'être achevé. Achevé, c'est le bon mot. Un peu comme Stewball (c'était un cheval blanc).
Sur ce site, on s'est toujours gardé d'être grossier. Vulgaire, ça oui. Souvent. Mais grossier, jamais. On ne sait pas combien de temps on va encore tenir. Parce que Pascal, mon cochon, il s'est fait plaisir. Vous l'ignorez peut-être, mais l'ami Obispo – que je trouve très sympathique au demeurant, sur le plan strictement humain – est un forcené de la musique. Le gars compose sans arrêt et sur son site, il propose des albums par pelletées : du flamenco, du jazz, de l'électro, du reggae... un puits sans fond. Alors quand Isabelle Adjani lui demande de concocter un disque de duos, Pascal se dit qu'il pourrait ajouter son grain de sel de temps en temps. Genre des chuchotements pour souffler la réplique à l'actrice, comme il faisait dans sa scie Tu Trouveras avec Natasha St-Pier.
Pour son "Chinese Democracy" rien qu'à elle, Isabelle avait dressé une liste d'invités longue comme le bras d'un perchiste. Pensez donc : Daniel Darc et Christophe vivaient encore à l'époque et avaient fait le déplacement. En tout cas jusqu'à leur studio, la plupart des prises d'Adjani ayant été enregistrées séparément. Les incontournables de 2023 sont tous là aussi : Etienne Daho pour un très bon Samouraï, Benjamin Biolay et même Akhenaton. Sans compter qu'au rayon international, le menu aligne le gotha eighties : Simon Le Bon (Duran Duran), Peter Murphy (Bauhaus) et David Sylvian, forcément puisque ça parle du Japon (je vous laisse réfléchir). Bref, du lourd.
Mais alors qu'on était en droit d'espérer un truc solide, quelques facéties viennent nous distraire. Gaëtan Roussel passé à l'autotune. Des jeux de mots qui, hors du contexte Gainsbourg, ne marchent plus (« J'en suis acquittée / Non, tu es à quitter »). Là aussi, c'est du lourd. Enfin du relou, surtout. Parce qu'il y a mon Pascal, tellement enthousiaste que c'en serait presque mignon, qui vient régulièrement s'incruster pour faire le suave entre deux vocalises anglophones. À tel point qu'à un moment on a envie de hurler : « Ta gueule, Pascal ! Maintenant tu la fermes, bordel ! » Désolé. Je vous avais dit que je ne tiendrais plus longtemps.
Bon. Je suis calmé. Trêve de parenthèses douloureuses. Parce qu'évidement, vous allez me dire : à quoi bon parler en long et en large d'un album décevant ? On est ici pour écouter une bonne chanson. Rassurez-vous, il y a ça aussi sur ce disque loupé mais pas totalement catastrophique. Réentendre la voix déchirante de Christophe, ça n'a pas de prix. Et la bonne nouvelle, c'est qu'il partage avec Adjani la meilleure plage de "Bande Originale". Celle qui sonne le moins Mylène Farmer. Celle où le mélange d'électro et de tradition japonaise est le plus efficace et ne fait pas trop carte postale. Celle où on est à peu près sûr de ne pas entendre Obispo, rogntudjuuu.
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