La madame vous dit qu'elle réclame votre attention ! Et comme beaucoup de ses consœurs, elle n'hésitera pas à être démonstrative pour tenter de se faire remarquer. Que voulez-vous ? C'est l'Amérique. Dans le rayon où officie Doja Cat, ce n'est pas en jouant sur la réserve qu'on parvient à se distinguer : demandez à Nicki Minaj, Cardi B ou Megan Thee Stallion si le flow suffit ; la première qui répond oui gagne une soirée bisque de homard chez Nadine de Rotschild, mais pas sûr que la baronne reçoive les prescrits minimaux en matière de standing. Et pourtant, elle sait recevoir la Rotschild ! C'est juste qu'en bonne fan de hip hop, elle préfère la street cred' aux poses sexy.
Doja Cat, elle, a depuis ses débuts le cul entre deux chaises. Capable de twerker – et entre deux chaises, ça n'est pas évident – sur des refrains r'n'b un peu mièvres, elle est aussi et avant tout une rappeuse convaincante. C'est pourquoi, dans ce registre où nos camarades pseudo-puritains d'Outre-Atlantique continuent d'entretenir le mythe viriliste tout en sexualisant systématiquement – et uniquement – le corps de la femme, on apprécierait qu'une artiste puisse de temps en temps se dire « libérée » sans reproduire sine qua non le même schéma. C'est particulièrement valable pour ce titre qui, musicalement à tout le moins, tendrait à rapprocher Doja Cat du hip hop plus classique, voire plus classieux, de Lauryn Hill ou de Little Simz.
Ça n'engage que moi, mais puisse-t-elle persévérer sur cette voie. S'il en faut pour tous les goûts, je dois dire que la production aux petits oignons d'Attention fait souffler un vent de fraîcheur bienvenu sur une scène américaine qui tourne un peu en rond. La réforme de ses codes étant plus que nécessaire, on sait que l'avenir nous offrira toujours plus de sonorités inattendues, tant le hip hop déborde de talents et d'expérimentateurs audacieux. Gageons qu'on aura également droit, tant qu'à faire, à des textes un peu moins lourdingues et plan-plan. Parce que non, le flow ne suffit plus ; seulement pour susciter l'attention, et a fortiori l'adhésion, on peut invoquer différents types d'arguments. Attendu que persuader n'est pas convaincre, tous ne se valent pas.
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