La chanson du 17 décembre : Chris Garneau - Crook

Le songwriting  de Chris Garneau, artiste américain sous-estimé, a évolué au fil de sa carrière vers des territoires de plus en plus aventureux. Pourtant l'homme semble revenir, désormais, à ses fondamentaux... quitte à flirter avec une certaine mièvrerie. Rassurez-vous, cet aspect vous sera totalement épargné aujourd'hui. Extrait du récent EP de 4 titres "Out of Love", Crook  est un modèle de délicatesse un rien académique, certes, mais d'un goût tout à fait exquis. Avec un sens de la retenue remarquable, tel un être profondément triste qui cherche à ne rien laisser paraître par fierté, Garneau nous livre sept minutes de chronique amoureuse déceptive.



Les deux dernières sont dominées par un talk-over  sensuel sur fond de tradition country. Oui, je sais : sur papier, cette seule mention aurait dû faire fuir toute personne munie d'oreilles en bon état. Sauf qu'ici, les éléments s'imbriquent parfaitement dans le storytelling de l'artiste, qui dépeint son petit western intime à la "Brokeback Mountain", proche de la sensiblerie mais toujours assez subtil pour ne pas sombrer dans le mélo. Les guitares et la batterie languides, malgré leur ancrage americana, restent culturellement accessibles grâce au patronage d'un piano nettement moins honky tonk. D'accord, Chris Garneau porte fièrement le Stetson mais on n'a pas pour autant l'impression d'être dans un épisode de "Dallas". Académique, oui. Ringard ? A priori, pas encore.


Commentaires

Marc a dit…
Encore un croisé en concert il y a quinze ans (ouch...) et perdu de vue depuis. Dans le genre, c'est forcément non original, mais quand c'est fort et sensible comme ici, on ne peut que s'incliner. En fait, il souffre surtout de la comparaison avec des artistes arrivés bien après lui comme The Coral Sea ou Perfume Genius.
Laurent a dit…
Oui, l'association avec Perfume Genius m'a toujours semblé logique. Tous deux ont de plus en plus sexualisé leur musique et ça s'est reflété dans un côté "icône" de plus en plus prononcé. En même temps, plus je pense au phénomène de l'icône gay, très représenté dans le paysage musical, plus je me dis que pléthore d'artistes ont pu représenter et représentent encore des parangons de virilité ou d'idéal féminin hétéronormés et qu'on ne s'en est pas rendu compte pendant très longtemps. Cela dit, pour revenir au binôme Garneau / Hadreas, le fait est que justement le premier a emprunté des chemins de traverse intéressants (son album "Yours" est formidable) pour revenir ensuite à des choses plus convenues, cependant que Mike Hadreas a poussé le bouchon beaucoup plus loin jusqu'à son album de l'an dernier. Si bien que je suis désormais beaucoup plus excité d'entendre la suite chez Perfume Genius alors qu'un nouveau disque de Chris Garneau, lui, ne suscitera sans doute plus qu'un intérêt instantané et peu durable.