La chanson du 14 décembre : Hugo TSR - Jeudi (feat. Jazzy Bazz)

Les fêtes, c'est pas toujours la joie. Un jeudi de décembre, on peut rencontrer deux catégories de personnes très différentes. Pendant que certain(e)s sont en train de faire deux heures de file à la Fnac pour acheter un Goncourt en espérant qu'il restera de l'emballage cadeau  tout en se demandant comment ça se fourre, une dinde  il y a les autres, celles et ceux qu'on ne voit pas. Des gens qui se demandent comment ils vont survivre à toute cette solitude, affronter cette joie préfabriquée et la torture de ce satané tube de Mariah Carey qui tourne en boucle dans les magasins. Des gens qui galèrent dans un job pourri, ou qui viennent peut-être de le perdre.

C'est à ces désœuvrés qu'on à affaire sur "Jeudi", le nouveau projet d'Hugo TSR. Un disque court où il raconte, en quelques chapitres, l'histoire d'un cheminot qui vit sa dernière journée de travail comme un pensum, dans l'isolement misanthrope de sa cabine. L'homme craint de se faire virer et finir comme ces ex-stars devenues SDF. « Tu peux tout perdre : Mallaury Nataf, Ophélie / C'est bientôt Noël et j'veux pas l'fêter comme Félix. »  Arrive alors l'avant-dernier chapitre, Gare Fantôme, où tout dégénère à cause d'une pause clope et de la rencontre inopinée avec Yvan, un collègue encore plus déprimé. Parce que la précarité, parce que l'amertume, parce que jeudi.



On peut diviser la scène rap française en deux catégories très différentes. D'un côté, les faiseurs d'air du temps, les enjailleurs, les ambianceurs qui s'inventent des passés de gangsters ou des vies de château sur des instrus taillées pour la décapotable, histoire d'effrayer la bourgeoise au feu rouge. Et puis de l'autre, il y a les storytellers  qui continuent de pratiquer un rap à l'ancienne, celui qu'on dit « conscient », de la musique de daron par des darons. Hugo et Jazzy Bazz font partie de ses fleurons depuis un moment, et Art Aknid est le fournisseur de prod' attitré de ces indécrottables mélancoliques. « Faut le voir chez soi », comme on dit aussi dans ce fameux film où Félix passe Noël dehors. "Jeudi", c'est un film de poche, un court-métrage musical nettement moins rigolo, où la véritable ordure est la société tout entière. Ça va comment, vous ? Moi ? Bah, comme un jeudi.


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