Ah, retrouver la voix lutine de Kazu Makino et les oscillations méditatives des frères Pace... On ne pensait pas que la vie nous offrirait un jour ce cadeau. Alors comment accueillir le retour de Blonde Redhead – pour un disque particulièrement aérien – sinon avec une immense gratitude ? L'improbable trio distille sa poésie unique depuis si longtemps qu'on le croyait retraité, mais c'est avant le confinement qu'il avait enregistré une dizaine de nouvelles compositions aux sonorités impalpables quoique jamais creuses. Peu importe pourquoi ces chansons nous parviennent si tardivement ; ce qui semble évident, c'est que le groupe les a polies avec amour.
"Sit Down for Dinner", le dixième album de Blonde Redhead, nous offre donc son lot de moments délicieux et se classe parmi les sommets du groupe, pas loin derrière "23" ou "Misery Is a Butterfly". De cette nouvelle collection, on retiendra notamment une plage titulaire en deux parties qui permet à la bande d'exprimer sa folie douce par le double prisme de l'évanescence et du chaos. En guise de trame sonore, Kazu finit par pousser quelques cris qui se fondent discrètement dans le paysage, tels des échos d'un passé plus mouvementé. Aujourd'hui très apaisé, le groupe nippo-italo-américain livre peut-être son ultime fait d'armes, et c'est un peu comme si un couple d'ermites polyamoureux nous envoyait une carte postale pour nous dire sa vie d'après. Alors on sourit pour au moins deux raisons : ça fait plaisir de savoir qu'ils ne nous ont pas oubliés, et puis parce qu'on est heureux pour eux.
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