Il faut savoir gré à certain(e)s artistes de ne pas céder aux modes et de continuer à pratiquer leur métier comme d'authentiques façonniers. Dans ce registre, j'ai récemment fait connaissance avec Buridane – sur ce qui se fait de mieux comme site de rencontre – et de prime abord, l'humilité de son art avait tout pour la rendre attachante sans la faire essentielle. Pourtant, sous ce vernis pour bois noble j'ai découvert, au fil d'écoutes toujours plus heureuses, des chansons sacrément solides, très joliment arrangées – le disque est réalisé par l'excellent et trop rare Féloche – et subtilement interprétées par une autrice-compositrice chevronnée.
"Colette Fantôme" est en effet le troisième album de cette fausse débutante qui a dix ans de carrière. Un disque habité par les secrets de famille et la farce des doubles vies, la Colette en question traînant « dans les branches de [son] arbre généalogique, un peu comme un fantôme qui hanterait les couloirs de [son] corps ». Ainsi, comme pour rendre justice à cette parente éloignée, morte d'avoir dû aimer dans l'ombre, l'album marque pour Buridane une renaissance, le début d'une vie d'après où la musique est comme une ablution avant l'envol.
Chasser la Nuit symbolise cette envie de célébrer l'existence, contre les pensées sombres qui l'envisagent comme une longue et lente agonie. Tandis que « d'autres se demandent encore si mettre au monde ne veut pas dire mettre à mort », Buridane – manifestement moins fan de Samuel Beckett que de Jardiland – construit patiemment son coin de verdure pour y cultiver l'amour et la joie. Cette lueur d'espoir bienvenue vient nous rappeler que de toute façon, nos nuits sont beaucoup trop étouffantes pour être passées à dormir.
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(et comme chaque fois, "je ne suis pas un robot")