La chanson du 6 mai : The Hives - Bogus Operandi

Il faut se remettre dans le contexte. Le début des années 2000, c'est pas hier, ça fait vingt ans. À l'époque, on sortait d'une décennie de boys bands sans se douter que la Corée préparait la revanche, le hip hop terminait sa crise d'adolescence mais n'avait pas entamé sa vraie mue, et le chirurgien de Madonna n'avait pas encore Parkinson. En ces temps immémoriaux où le petit Zuckerberg pétait ses derniers boutons d'acné, on regardait toujours MTV. Les CD's se vendaient plus que les vinyles chez Caroline Music, où on découvrait de nouveaux disques au casque. Et nom d'un chien, il fallait même faire la file avec son vrai corps pour acheter des billets de concert. Pas des QR-codes, non : des vrais billets stylés qu'on pouvait coller dans son scrapbook, pour garder le souvenir d'une soirée dont on ressortait sans la moindre vidéo tremblante filmée en mode portrait.  

C'est dans cette ambiance que le "Rock'n'Folk" de Philippe Manœuvre vendait ses magazines par camions, affirmant à qui voulait l'entendre que le rock à guitares faisait son grand retour. Qu'après des années 80 jugées maudites et des années 90 partagées entre grunge, britpop et rap californien, cette fois ça y était : la relève était assurée. Les sauveurs s'appelaient Strokes, Libertines ou White Stripes, mais aussi pléthore d'autres groupes en qui les espoirs nourris étaient démesurés, et qui ont depuis sombré dans le cruel vortex de l'après-hype. À défaut de sauver Willy, sauvons un de ces soldats tombés pour la cause. Les Hives faisaient partie de ses plus fameux hérauts et semblaient avoir tout compris : le code couleur, le frontman allumé, les riffs dingues, et un vrai tube en guise de carte de visite. Jamais un groupe suédois n'avait atteint ce niveau de notoriété (non, je déconne).

Bref. Cette reconnaissance internationale s'est estompée à mesure que la mode évoluait à nouveau, et les Hives sont retombés dans l'oubli sitôt venu le premier twerk de Rihanna. Leur dernier album (anecdotique) date de 2012, c'est vous dire si on a eu le temps de passer à autre chose. Pourtant, "The Death of Randy Fitzsimmons" est annoncé pour cette année et même si tout le monde s'en tamponne le coquillard, ce n'est pas une raison pour bouder son plaisir devant ce single pétaradant qui remet bien les idées en place. Attention : les images du clip, parodie de slashers aux relents d'Evil Dead, atteignent un tel niveau de gore qu'on se dit que l'algorithme YouTube a encore des progrès à faire pour peaufiner son système de censure. Âmes sensibles, soyez prévenues par ailleurs que même à l'aveugle, le son du jour peut vous posséder : le rock, c'est la musique du diable.


Commentaires

Marc a dit…
C'est dingue, on retrouve les raisons pour lesquelles ça nous excitait. Et un peu aussi pourquoi on s'est lassés...
Laurent a dit…
Haha. Oui effectivement, il y a un côté tout-en-un dans ce titre (dont je retiens le côté excitant avant le possible côté fatigant). Je dis que ça doit se réécouter à l'aune de la récente victoire de la Suède à l'Eurovision (ou pas).